Dans les années 50, la motorisation de l’agriculture a réduit leur emploi, la population de chevaux de trait a chuté avant d’être sauvée, paradoxalement, par la boucherie chevaline dans les années 70. Mais le trait poitevin mulassier, lui, a failli disparaître car moins charnu, donc moins intéressant pour la boucherie. « En 1998, les éleveurs se sont mobilisés pour sauver la race à travers l’association nationale des Races mulassières du Poitou », explique Baptiste Vivinus, propriétaire à Doix-lès-Fontaines du côté de Fontenay-le-Comte. « Malheureusement, la race reste menacée. »
Aujourd’hui, on compte environ 350 juments réparties majoritairement en Vendée, Deux-Sèvres, Vienne, Charente et Charente-Maritime. Le berceau de la race. Baptiste milite pour sa préservation, en proposant ses services dans le labour et le transport de personnes. « J’aime son allure et son flegme. »
Selon le Conseil des Equidés des Pays de la Loire, 35 chevaux de traits (toutes races confondues) sont nés l’année dernière en Vendée. Minoritaires, ils ne représentent que 7 % des naissances d’équidés dans le département.
Cette passion pour le cheval de trait, Franck Chantriaux la partage à la ferme des Longs-crins, près de Saint-Florent-des-Bois. « C’est mon compagnon de labeur. » Quand il mène son trait breton, on assiste à des scènes d’un autre temps, qui réveillent des souvenirs et ravissent les plus jeunes. « Et c’est toujours un spectacle à voir ! »
Franck marche à côté de sa jument et lui parle doucement « pour l’encourager dans l’effort ou pour freiner ses ardeurs. » Les chevaux de trait sont compacts et frisent les 800 kg. « Son encolure est courte, son dos est musclé, sa croupe est puissante et il est court sur patte, détaille Franck Chantriaux. Il manœuvre vite, sans énergie fossile ou rejet polluant. » Son coût aussi n’a rien à voir avec un tracteur. Il faut compter entre 5 et 7 000 € pour un cheval dressé, mais l’investissement vaut le coup.
Écologique, économique et sociale, la traction animale est à nouveau dans l’air du temps. Certains vignerons et maraîchers reviennent à son utilisation. Au domaine des Jumeaux, à Chaillé-sous-les-Ormeaux, Jean-Marc Tard a fait ce choix. « Mon père maniait déjà l’outil avec le cheval. J’ai trouvé Valdy, un trait comtois déjà dressé et je m’y suis mis. » Derrière Valdy et sa charrue, Jean-Marc chausse sa vigne en automne (il ramène de la terre contre et entre les ceps), et la déchausse au printemps. Habitué à sa voix, son cheval obéit au doigt et à l’œil. « Le trait permet un travail précis et de qualité. »
Ce que confirme Vincent Pipaud, à Saint-Gilles-Croix-de-Vie. Installé depuis de nombreuses années, le patron des Attelages de la Vie a diversifié ses activités. Du nettoyage des cours d’eau aux balades en calèche, aujourd’hui, les touristes découvrent ses cobs sur les plages, à collecter les déchets. « C’est la force tranquille. »
En zones humides ou sur le sable, aucun véhicule motorisé ne peut rivaliser avec le cheval. « La surface limitée des sabots suffit à assurer la portance au sol. Il reste intact, sans ornière. » Un « boulot à l’ancienne » qui réunit efficacité et respect de la faune et la flore. C’est là, que l’animal redevient un outil « mais de médiation » cette fois. Des notions qui lui tiennent à cœur. « O n est bien ensemble. Je les aime et ils me le rendent bien. Grâce à eux, je fais de belles rencontres. »
Dans le Sud-Vendée, Stéphane Guillon, maire de Bouillé-Courdault, est sur la même longueur d’onde. Depuis deux ans, chaque matin, le bruit des sabots réveille ses concitoyens. « Les enfants vont à l’école en calèche ! sourit l’édile. Ça ne coûte pas plus cher e t franchement à voir le sourire des passagers ce mode de transport fait l’unanimité. » Cette démarche, unique à l’époque dans les Pays de la Loire, a été filmée et mise en ligne. « On a fait 1 million de vues. Ça marche du tonnerre. » L’idée fait son chemin.
Crédit Photo : OUEST FRANCE
Source : Ouest France