Ils ont bravé la pluie qui tombait dru, ce mercredi 4 août, sur l’hippodrome de l’Isle-Briand, au Lion-d’Angers, près de Segré (Maine-et-Loire). « Ils », ce ne sont pas des stars du jour, ces chevaux répondant à des noms plus étonnants les uns que les autres (de Isla Bonita à Chela speed, en passant par Ipataya) ni de ceux qui les montent, les jockeys. Non, « ils », ce sont les quelque 700 anonymes qui se sont pressés dans les tribunes pour assister aux huit courses du jour : les parieurs.
Trouver ces férus de courses hippiques sur les 162 ha de l’Isle-Briand est aisé. Tendez l’oreille : « Nous sommes dans le tour final et c’est Inattendue qui est en tête ! » Un speaker au débit impressionnant commente la course dans les moindres détails, à travers des haut-parleurs rugissants. Il est midi, et la première course du jour vient de se terminer.
« Il y en a qui se détendent en dansant, nous, c’est en pariant »
« Pas de chance, j’ai déjà perdu » , soupire Colette. L’octogénaire se tient dans le hall d’entrée de l’hippodrome, programme des courses à la main, flanquée de deux amies. À l’heure où tous ont les yeux fixés sur les écrans annonçant les cotes de la prochaine épreuve, la triplette préfère en rire. « On ne vient pas ici pour l’argent, poursuit Colette. Au contraire, c’est notre loisir. On fait des rencontres, on est en plein air. Il y en a qui se détendent en dansant, nous, c’est en pariant ! »
Alors que les sportifs se préparent, les parieurs fourmillent. Dans les tribunes, les odeurs de pluie et de frites se mêlent aux files formées devant les guichets enregistrant les mises. Dans l’une d’elles, Antoine et son fils Armand, venus de Cantenay-Épinard, près d’Angers. « Je pariais quand j’étais gosse, et j’ai voulu faire découvrir ça à mon fils » , explique le père.
À deux pas, Michel est un parieur plus expérimenté : « Ça fait sept huit ans que je parie sur les chevaux. Venir dans les hippodromes, c’est bien, ça change des PMU, s’amuse-t-il. Mais je ne mise jamais de grosses sommes, il ne faut pas se ruiner là-dedans. »
Concentration pendant les courses
« Plus que deux minutes avant le départ ! » À cette information du speaker, le hall d’entrée, soudain, se vide. Direction les tribunes. Là-bas, des couples, des groupes d’amis et des familles, comme celle d’Arthur, Angevin ayant « grandi avec les courses hippiques » et voulant « faire partager [sa] passion à ses trois enfants ».
Le départ est lancé. Alors que les mieux équipés déploient leurs jumelles, les conversations s’atténuent. Les regards se crispent et suivent les tours de piste des jockeys, sous les commentaires d’un speaker survolté.
« Allez ! Plus vite ! Plus qu’un tour, accélère ! » Le public se fait de plus en plus virulent, jusqu’au passage final devant les tribunes, quand petits et grands se lèvent de leur siège et les plus déterminés se ruent vers les barrières délimitant la piste. « C’est pour ça qu’on vient aussi ! s’exclame Christian. Sentir l’adrénaline monter, vivre la course à fond avec le cheval sur lequel on a misé, quel pied ! »
« Sentir l’adrénaline monter »
De retour dans le hall, la même fourmilière se presse aux guichets. Mais cette fois, Colette a le sourire : « J’ai enfin gagné », confie-t-elle.
À ses côtés, Henri ne perd pas une miette du brouhaha environnant. À 90 ans passés, ce passionné de courses hippiques venu de Château-Gontier (Mayenne) a l’œil pétillant : « J’ai toujours travaillé dans l’hippisme, sans jamais parier, et je me rends en moyenne à 85 courses par an. » Et ça tombe bien, car la quatrième course du jour va débuter. Aidé de sa canne, Henri part vers les gradins. « Départ dans moins d’une minute ! » s’époumone alors le speaker.
Antonie COMTE
Crédit Photo : Ouest France
Source : Ouest France