Il tord, perce le cuir, et créer des pièces uniques. Des gestes lents, empreints d’une longue passion du bel ouvrage : « Il faut des aptitudes manuelles, du soin esthétique, et toujours penser qu’on travaille autant pour le confort du cavalier que pour celui du cheval », observe Michel Charrier, sellier-harnacheur au Haras de la Vendée, à La Roche-sur-Yon, depuis 35 ans.
Point d’appui de l’élevage local, à son apogée le haras accueillait plus de 200 étalons. À l’intérieur de cette vénérable institution : la sellerie. Orgueil du haras yonnais, cette spécialité locale fait l’envie et l’admiration des connaisseurs. C’est là qu’on coud, qu’on pique les plus belles selles et les plus beaux harnais. « Un vrai savoir-faire pour une production spécifique dédiée à des chevaux et des attelages d’exceptions. Le Made in Haras ! », défend fièrement le sellier. « Nous sommes aussi un centre de formation. » Aujourd’hui, en Vendée, ils ne sont qu’une poignée à pratiquer ce métier. « Cinq ou six, et pour certains formés ici. »
La morphologie de l’animal
Durant des années, la sellerie yonnaise a fourni des harnachements des haras nationaux, pour différentes races, les chevaux légers (poney, arabe, anglo-arabe, selle français, pur sang anglais) ou lourds (percheron, trait breton, cob, boulonnais…). « Lorsque l’on fabrique un licol, ou des rênes, il faut savoir ce qui va en être fait. Il faut une connaissance de la morphologie de l’animal mais aussi de l’utilisation du produit. C’est primordial. »
Pour cela il s’aide d’outils par dizaines : des fers à bout, des emporte-pièces de toutes tailles pour faire passer les aiguilles de coutures… Selles, longes, sangles… tout est réalisé manuellement dans son atelier.
Depuis une trentaine d’années, tout comme l’équitation, son métier s’est féminisé. « Nous formons de nombreuses jeunes femmes, qui pour certaines reprendront le métier, et pour d’autres, travailleront le cuir sous d’autres formes. » La maréchalerie, elle aussi, se féminise. À Challans, Marine Rivallin en est l’exemple.
À 26 ans, Marine Rivalin s’est installée depuis moins d’un an. Depuis son plus jeune âge, elle côtoie les chevaux. Au point d’en avoir fait son métier : la jeune maréchale-ferrante se déplace dans les clubs, les haras, mais aussi chez des particuliers. « Je travaille principalement sur des chevaux de sport ou de loisir. »
Corriger des problèmes d’aplomb ou de boiterie
En Vendée, elles sont deux professionnelles pour une vingtaine de maréchaux-ferrants. « On a l’image d’un vieux métier. Mais tous nos outils ne cessent d’évoluer, tout est de plus en plus léger, on reste à la pointe des nouvelles technologies. »
Le temps où les propriétaires amenaient leurs chevaux au maréchal-ferrant du village est bien révolu. De son fourgon aménagé, Marine sort sa forge, frappe le fer et l’appose sur le sabot. Pour des poneys ou des chevaux, Marine visite deux à trois propriétaires par jour. « L’été, on referre les chevaux en moyenne toutes cinq à six semaines et l’hiver on pousse à huit. Pour changer quatre fers, il faut compter 90 et 95 € TTC. »
Le ferrage soin indispensable et très important pour le cheval dépend de la race de l’animal, du type de travail qu’il effectue et de la façon dont il use habituellement ses sabots. « Les écuries de course ont leurs propres intervenants. C’est très spécifique, ils sont dans une logique de résultats », détaille-t-elle.
Ses clients pensent plus au bien-être de leur cheval. « Les fers n’ont pas le même profil. Pour des trotteurs, ils sont petits, légers et servent de protection. Je pose plus souvent des ferrures confortables, avec du rolling, ce qui facilite la bascule du pied. Il y a moins de contrainte sur les tissus, les tendons. »
Le dos courbé, le pied du cheval coincé entre ses jambes, Marine fixe les derniers clous et peaufine les petits détails. Un travail sur-mesure, réalisé en fonction de l’animal. Elle peut ainsi rectifier les problèmes d’aplomb ou de boiterie. « Un cheval qui a des bons pieds et qui ne travaille pas n’a pas spécialement de fers. On s’adapte à la fonction du cheval », sourit la jeune femme. À l’entendre et à la voir vivre de sa passion, nul doute que Marine n’est pas prêtre d’arrêter de battre le fer.
Source : Ouest France